Chronique d’un retour annoncé, par Chantal Maréchal, coach-thérapeute…
Vous ne rêvez pas, on parle de vous, les quinquas. Vous étiez à l’honneur lors des 2èmes assises parlementaires des seniors qui se sont tenues à l’assemblée nationale le 10 juin 2009. Redressez-vous, abandonnez vos pantoufles, vos somnifères et anxiolytiques, la société vient de s’apercevoir que vous étiez une richesse pour la France.
Il était temps !
Nous arrivons bons derniers parmi nos voisins européens en matière d’activité des quinquas, notamment grâce au mécanisme des préretraites. Pour le gouvernement, la mise en préretraite évitait d’aggraver les statistiques du chômage. Pour les entreprises, embaucher un jeune super diplômé d’une grande école coûtait bien moins cher que le salaire d’un quinqua. Pour les salariés, c’était le moyen de quitter l’entreprise au plus vite pour bénéficier d’un repos bien mérité. Or, si la liste de l’ANPE a été allégée ce ne fut pas le cas pour les dépenses de l’assurance la Sécurité Sociale. Quant aux entreprises cédant au jeunisme, après une bouffée d’oxygène, le savoir faire des anciens manque et la situation financière ne s’est pas toujours améliorée. Enfin, hors monde du travail, chômeurs, pré ou jeunes retraités somatisent. Bonjour les angoisses, la bonne dépression est au rendez-vous. Ils arrêtent progressivement leur vie sociale, se réfugient dans la nourriture, l’alcool, et creusent inexorablement le trou de la sécurité sociale. Cette politique de court terme arrangeait tout le monde, mais nous a amené à aggraver la situation.
Alors que s’est-il passé le 10 juin ?
À notre grande surprise un vent de fraîcheur s’est répandu dans la salle Chaban-Delmas lorsque Laurent Wauquier, Xavier Bertrand, et Brice Hortefeux ont montré la même détermination à vouloir changer l’approche traditionnelle en ayant pour une fois une vue d’ensemble et non segmentée du problème de l’emploi : il ne faut pas privilégier les jeunes contre les quinquas ou vice versa, mais rechercher toutes les solutions qui enrichissent les uns et les autres. En tout cas, c’est courageux d’annoncer en période de crise qu’il est nécessaire de progresser ensemble, tous âges confondus. Pas question de mettre une classe d’âge au rebus ! Peut-on rêver que le gouvernement cesse de faire du rafistolage ? Peut-être bien ! Le gouvernement a souhaité mettre en valeur les actions des entreprises en faveur de l’emploi des seniors. Il s’est pour cela appuyé sur Vigeo (l’entreprise fondée par Nicole Notat) qui a mené des « audits senior » auprès d’entreprises partenaires.
Concrètement, que proposent les membres du gouvernement ?
Trois mesures :
Mettre en place un bilan de carrière pour tous les salariés avant 45 ans.
Développer le tutorat au sein des entreprises.
S’appuyer sur la créativité des entreprises qui ont mis en place avec succès des bonnes pratiques pour stimuler l’emploi et améliorer les postes de travail des seniors.
Si la mise en place du tutorat et des bonnes pratiques a été assez bien définie, il n’en a pas été de même pour le bilan de carrière.
Le bilan de carrière
Il serait généralisé à tous les salariés des entreprises de plus de 50 employés à partir de mai 2010. C’est très bien tout cela, mais qu’est ce que l’on entend par bilan de carrière ? On reste perplexe surtout lorsque l’on a entendu utiliser indifféremment pendant le colloque les termes de bilan de carrière, bilan de compétences, bilan de gestion des carrières.
Le tutorat
C’est ainsi, que Madame Anne Marie Guillemard, Professeur des universités en sociologie à l’Université Paris V, a préféré le binômat (échange bilatéral entre jeune et senior) au tutorat (transmission et reproduction sans véritable échange). Le binômat, c’est confronter la pratique apportée par l’ancien et la théorie acquise par le jeune pour s’enrichir d’une compétence dynamique.
Un exemple à suivre
Parmi les bonnes pratiques, notons l’intervention remarquable de Philippe de Gibon, Président fondateur de Convers Télémarketing, qui a montré comment l’on pouvait créer en France une activité de centre d’appel performante et rentable.
Au début, Convers employait des étudiants, mais est passé à l’emploi de femmes (souvent mères de famille) et de seniors de plus en plus nombreux. Philippe de Gibon leur permet notamment de choisir leurs horaires et leur durée de travail. Grâce à cette politique, Convers ne délocalise pas et offre un service de meilleure qualité.
Il arrive donc que les hommes politiques aient de bonnes idées, et ils l’ont montré ce 12 juin 2009. Reste à les mettre en œuvre. Comment ces principes vont-ils être mis en place ? Comment éviter que des mécanismes administratifs et bureaucratiques les vident de leur sens comme cela arrive trop souvent ? That is the question !